Carac'Terre : Isla, biologiste marine engagée pour les océans

C'est l'été, la saison du soleil et de la mer ! Pour fêter la sortie de nos maillots de bains et le début de nos premiers plongeons, on vous fait rencontrer Isla qui travaille tous les jours pour protéger nos mers et océans, et plus particulièrement toutes les petites bêtes qui y vivent. Saviez-vous que les poissons peuvent être machiavéliques ? Connaissez-vous déjà le phénomène de blanchissement des coraux ?  Découvrez tout ça avec Isla et son univers aquatique !

Peux-tu te présenter ? 

Je suis un méli-mélo de sang néerlandais, allemand et français. J'ai grandi au Kenya et j'habite maintenant à Bristol au Royaume-Uni. Je suis doctorante en biologie marine et j’examine plus particulièrement comment les poissons utilisent tous leurs sens (vue/odeur/son) pour communiquer entre eux et comment ils sont impactés par des facteurs de stress anthropiques, c’est-à-dire causé par l’homme. 

Peux-tu nous en dire plus sur ton enfance et ton parcours ?

Ma mère est une biologiste spécialisée dans la préservation des animaux sauvages et mon père est un cinéaste de documentaires animaliers. Le Kenya se trouvait être un point de rencontre pour les professions de mes deux parents. J’avais parfois la chance de les suivre dans leur travail. A 12 ans, j’ai déménagé au Royaume-Uni, ce qui fut un grand changement ! 

J’ai grandi avec un accès aux espaces sauvages, j’ai rapidement développé une fascination pour la nature qui m’entourait, et surtout pour l’océan. A 10 ans, j’ai pu faire un stage de plongée et la découverte du monde marin fut une révélation pour moi. Je savais que je voulais faire un métier en lien avec la faune donc j’ai décidé d’étudier la biologie à l’université avant de me lancer dans un doctorat en biologie marine. 

Peux-tu nous raconter ce que tu fais au quotidien ?

C’est un environnement très dynamique qui change énormément (bien entendu hors Covid). Je peux passer plusieurs mois à planifier une excursion à Bristol en rassemblant le matériel nécessaire, soumettant des dossiers afin de décrocher un financement pour ma recherche.

Sans surprise la partie que j’adore c’est les excursions où je peux passer jusqu’à 8h dans l’eau afin de récolter le maximum de données qui pourraient me permettre d’élucider la question auquel je tente de répondre. La partie un peu plus pénible est l’analyse derrière un ordinateur de toutes ces données récoltées pendant mon excursion mais essentielle.

J’aime beaucoup aussi partager mes découvertes une fois rentrée au Royaume-Uni, et pas forcément qu’à des experts ou des conférences internationales. J’adore discuter de ma recherche avec des écoliers ou mes voisins, ils me posent toujours des questions fascinantes. 

 

Carac'Terre, Tomojo

 

Comment arrives-tu à engager la conversation avec des personnes qui ne sont pas familiers avec ton métier ? 

La plupart des personnes avec qui je discute sont très intriguées par ma recherche quand je leur explique qu’en observant le comportement d’animaux marins on peut distinguer certains caractères. J’ai déjà observé des poissons machiavéliques et rusés qui vont tromper d’autre poissons pour obtenir ce qu’ils veulent.

Une telle accroche me permet de capturer l’attention de mon interlocuteur pour ensuite échanger sur des sujets tels que pourquoi l’observation et la compréhension du comportement des poissons est si importante dans l’implication de la santé des coraux ainsi que la survie des stock marins comme source de protéine vitale pour certaines populations et pourquoi les océans sont si importants pour la santé mentale. 

On aime bien la thématique de l'alimentation chez Tomojo : quel était ton mode d'alimentation quand tu étais plus jeune ? Et celui de maintenant ?

Quand j’étais jeune j’ai toujours aimé manger des produits frais qui venaient du marché. Mes parents ne me laissaient pas manger des confiseries en revanche j’avais toujours accès libre à un bol de fruits. Plus tard, en faisant pousser ma propre nourriture j’ai pris conscience du temps et de l’énergie qu’il faut pour faire pousser ce que l’on mange. Cette prise de conscience m’a fait devenir végétarienne, et maintenant végétalienne.

Pour moi l’impact environnemental est très important et il semble qu’être végétalien permet d’avoir celui le plus réduit. Je suis devenue végétarienne à 18 ans, dans ma famille on mangeait beaucoup de viande, on m’appelait "la carnivore", mais maintenant ça a changé. Je sais combien de carbone il faut pour produire un steak de viande, c’était de plus en plus difficile de justifier le plaisir de consommer ces produits quand on connait toutes les délicieuses alternatives végétales qu'on a à disposition au Royaume Uni. C'est facile pour moi d'être végétalienne maintenant, quand j'étais enfant ça aurait été beaucoup plus difficile.

Pendant mes excursions, c'est toujours plus difficile. Quand je voyage, je vais souvent dans des endroits éloignés où il n'y a pas beaucoup de choix. J'essaie de m'adapter à la culture locale. Si je suis reçu par une famille qui a pêché du poisson et me prépare un repas, je ne sais ne pas faire primer mes choix personnels. J'essaie d'être souple et de m'adapter. 

Quels sont tes gestes quotidiens envers la planète pour réduire ton empreinte dans ta vie quotidienne ? Est-ce que la question du transport pour te rendre à tes excursions est un dilemme pour toi et si oui comment fais-tu pour le gérer ? 

J'essaie de faire des petits gestes, de prendre mon vélo ou marcher et prendre le train autant que possible. Cela ne me dérange pas de prendre du temps supplémentaire afin de trouver des alternatives de transport à faible émissions carbone. Je mange local, de saison et suis végane. 

La question du voyage pour mon doctorat est un grand dilemme pour moi. Si je ne voyageais pas, je ne pourrais pas faire mon travail de recherche. Je dois prendre des vols long courrier, il n'y a malheureusement pas d'alternatives. Je compense mes émissions carbones liées à l'avion. Je sais que ça ne règle le problème d'aucune manière, mais je trouve que c’est le moins pire quand il n'y a pas d’alternatives. J'essaie aussi de coordonner mes sorties sur le terrain et les conférences dans la même région pour réduire mes émissions de carbone. J'essaie également de ne pas me déplacer juste pour une conférence mais cela reste un gros dilemme pour moi.

L'équipe de recherche dont je fais partie essaye d'intégrer dans nos demandes de financement un budget spécifique pour que la compensation carbone de nos excursions fasse partie de l’enveloppe. 

Comment vois-tu les choses quant au changement climatique ? 

Il y a des jours où je suis vraiment déprimée par tout ce qu'il se passe.
Les résultats des recherches que je mènent sur l’impact de l’homme sur les océans peuvent être catastrophiques. J'essaye de garder en tête quelques exemples où il y a du positif, cependant nous avons déjà atteint certains points de basculement, la vraie question désormais est de savoir si nous pouvons en éviter d'autres. 

 

Carac'Terre, Tomojo

 

Le récif corallien est un bon exemple de la façon dont nous avons atteint un point de basculement : sur l’île Lizard par exemple le réchauffement des océans provoque le blanchissement en masse des coraux qui est un signe de mort imminente.  C'est l'expulsion des algues coralliennes qui provoque le blanchissement que l'on peut voir, une fois blanchies elles meurent lentement de faim car elles ont besoin des algues pour les aider à se nourrir suffisamment (photosynthèse du soleil).  Si l'eau reste trop chaude pour trop longtemps et les algues ne retournent pas au corail, le corail blanchi mourra de faim. 

Ce qui me donne de l’espoir c’est que nous savons beaucoup de choses en tant qu'humains, mais pas tout, certaines zones coralliennes semblent bien se porter, le corail repousse beaucoup plus rapidement que la norme. Il se passe beaucoup de choses que nous ne comprenons pas complètement, y compris des phénomènes positifs tel que celui-ci que l’on ne sait expliquer, mais ne pouvons pas prendre le risque et compter sur ces surprises.

Nous on définit le Mojo comme quelque chose qui te redonne la pêche/ton énergie, alors toi qu'est ce qui te redonne le Mojo ? 

Pouvoir observer un animal dans la nature (pas forcément l’océan) que je n’ai pas pour habitude de voir et me rendre compte que je n’ai aucune idée de ce qu’il est en train de faire mais que cela lui semble signifiant. J’adore me rappeler que je connais si peu du monde vivant. 

Tu es plutôt…

Cat Stevens ou Snoop Dog ? Cat Stevens  

Tintin et Milou ou Obélix et Idefix ? Obélix et Idéfix for sure 

Team chat ou chien ? Chien